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A North-Castel, une petite ville près de la montagne, nous avions du repos. Le 9, nous reprîmes la route pour 19 miles jusqu’à Phillipsburg, où nous avions encore du repos. Le 12, le général Washington de l’armée américaine nous passa en revue[115]. Son uniforme était bleu foncé, avec des rabats et parements jaune cuir, 2 épaulettes en métal repoussé doré, ainsi qu’un grand chapeau etc.

Wir hatten Rastag alda zu Nord-Cassel ein klein Städtgen am Gebürge. Den 9ten brachen wir wiedrum auf 19 Meilen biß Philipsburg alda hatten wir wiedrum Rastag. Den 12 passierten wir die Mustrung vor dem General Wassington von der Americanischen Armée. Seine Uniforme ware dunckelblau mit ledergelben Klap-pen und Aufschlägen 2 geschlagene goldne Epaullettes nebst einem grossen Huth etc :

Là nous étions au repos jusqu’au soir du 21, où nous fournissions un détachement de 2500 hommes, des Français et des Américains, qui marchâmes sur KönigsBritsch et Sandihock. Dès que nous nous approchâmes de Königs-Britsch et de Staten Island, les Anglais s’aperçurent que des Français étaient en route ; ils vinrent aussitôt à notre rencontre et nous eûmes une assez violente attaque près de Königs-Britsch et de Staten Island[116]. Le lendemain nous retournâmes à Phillipsburg.

Alda hatten wir Rastag biß den 21ten abends, als dan gaben wir ein Detachement von 2500 Mann Franzosen und Americaner welche nach der Königs-Britsch und Sandihock marschierten. Sobald wir gegen der Königs-Britsch und Statten-Eyland kommen seyn, wurden die Engländer schon gewahr daß Franzosen um den Weg seyn, sie kamen uns auch gleich entgegen und wir hatten einen starcken Atack alda bey der Königs- Brütsch und Statten-Eyland. Den anderen Tag kamen wir wiedrum zurück nach Philipsburg.

Peu après nous commençâmes la construction de baraquements, car nous devions rester un mois[117]. Non loin de là campait également l’armée américaine, près de West-Point, une des plus puissantes forteresses d’Amérique[118], qu’il est presque impossible de prendre. Là il advint qu’un adjudant-général anglais du nom de N.....[119] se déguisât en espion venu de New York dans l’uniforme d’un colonel américain. Lorsqu’il arriva dans le camp américain, un soldat

Bald darauf fingen wir an Baracken zu bauen weilen wir ein Monath lang alda verblieben. Nicht weit davon campirte auch die Americanische Armée nahe bey der West-point, welches eine der stärckten Vestung ist in America und fast unmöglich einzunehmen. Es truge sich auch zu alda, daß ein Englischer General Adjudant mit Namens N……. sich als Spion verkleidetete aus Neuyorck in einer Uniform als Americanischer Obrist. Als er an das Americanische Lager kam, hatte ein Soldat vor dem

https://gallica.bnf.fr/iiif/ark:/12148/btv1b10110846m/f23/pct:0,0,50,100/,700/0/native.jpg

Strasbourg, Médiathèque André Malraux, ms f 15, p. 44.

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 Notes

115.Cumberland, huile sur toile, après 1795, New York, The Metropolitan Museum of Art [reproduction en ligne - RMN].
116. Le « nous » employé ici par Flohr englobe l’ensemble de l’armée coalisée, pas uniquement le Royal-Deux-Ponts comme on pourrait le croire de prime abord. On peut se demander de quel incident parle Flohr. Selon Stephen Bonsal, dans When the French were here : a narrative of the sejour of the French forces in America and their contribution to the Yorktown campaign, drawn from unpublished reports and letters of participants in the national archives of France and the MS Division of the Library of Congress, Doubleday-Doran, New York, 1945, p. 107 : «this little encounter, which was evidently not regarded as auspicious by the french, was the only clash that took place on the long march from the Hudson to the James» (« cette petite rencontre, qui n’a évidemment pas été de bon augure aux yeux des français, fut le seul combat au cours de la longue marche de l’Hudson jusqu’au James »). Il s’agit d’une attaque improvisée par Washington près de King’s Bridge, au nord de New York, ce qui contredit les dires de Flohr puisqu’il situe l’attaque près de Staten Island au sud. Dans son Histoire des troubles de l’Amérique anglaise, François Soules fait référence à une attaque contre le Fort Washington à laquelle participe la Légion de Lauzun ainsi qu’à un combat contre un corps de soldats américains loyalistes (les dragons de Delancey). Cf. Soules (François) Histoire des troubles de l’Amérique anglaise, Paris, Buisson, 1787, p. 376 et Acomb (Evelyn) (éd.), The Revolutionnary Journal of Baron Ludwig von Closen 1780-1783, University of North Carolina Press, Chapel Hill, 1958, p. 89. Guillaume de Deux-Ponts mentionnent aussi l’événement qui a lieu le 5 juillet. Une deuxième hypothèse consisterait à voir là une référence à une expédition de reconnaissance menée le 21, selon Closen, mais qui n’a pas donné lieu à des combats « violents ». Une chose est sûre, le Royal-Deux-Ponts ne participe à aucune des deux expéditions.
117. L’organisation du campement d’une armée dépend dans une large mesure du contexte militaire dans lequel la campagne se déroule. Si l’armée est en marche, alors le camp se résume à des tentes. En revanche si l’armée de campagne s’installe dans une région, alors les troupes peuvent s’aménager des baraquements de bois.
118. La forteresse de Westpoint est une position stratégique occupée par les troupes continentales tout au long du conflit. Située sur les bord du fleuve Hudson, elle commande le passage du fleuve et contrôle son trafic. Les Américains installent une chaîne sur le fleuve pour prévenir tout passage tenté par un navire ennemi. Le maintien de cette position est vital pour empêcher l’armée anglaise d’établir une ligne de communication entre New York et le Québec, mais aussi pour garder le contrôle de King’s ferry, artère vital des lignes de communications américaines entre les colonies du nord et du sud. La trahison de Benedict Arnold incluait notamment la remise par le traitre de cette forteresse aux Anglais.
119. L’individu en question est le major John André, jeune officier britannique servant d’intermédiaire en qualité d’espion entre le général Clinton à New York et Benedict Arnold à Westpoint. Il est l’artisan de la fameuse « trahison d’Arnold » le changement de camp d’un des meilleurs généraux américains. Ce complot échoue à cause de la capture d’André par trois miliciens américains près de Tarrytown, épisode que Flohr relate avec plus ou moins de précision dans les trois pages suivantes. Le jeune major André est jugé puis pendu pour ses activités d’espionnage. C’était un jeune homme très apprécié dans les cercles aristocratiques, sa mort causa un grand émoi en Angleterre.