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et avait rejoint l’armée anglaise près de New York. Quant à l’adjudant-général, il fut fait prisonnier, le soldat ayant appelé la garde et ayant demandé qu’on l’arrête, disant qu’il était un espion et qu’il le connaissait, et en moins de deux heures il était pendu, ce qui ne serait pas arrivé si on n’avait pas trouvé sur lui les papiers concernant la trahison. Dès que les Anglais apprirent qu’il devait être pendu ils entreprirent tout pour le délivrer coûte que coûte parce que c’était un membre de la famille royale d’Angleterre. Mais il n’y avait plus rien à faire, il fallait le pendre.

engellischen Armee reteriert gegen Ney-Yorck. Was aber jetzt den General Adjudant anbelanget hatte der Soldat die Wacht geruffen und gesacht sie solten denjenigen gleich in Arrest nehmen er wäre ein Spion er thätte ihn wohl kennen darauf nahmen sie ihn gefan-gen und in Zeit von 2 Stunden schon aufgehänget worden welches aber nicht geschehen wäre wann man nicht die Brüffschaften von der Veräterey bey ihm gefunden hätte. Sobald die Engelländer erfuhren daß er solte aufgehänget werden wurde alle Angestallt gemacht in wiedrum loß zu machen es möchte kosten was es wolle weil er von königlicher Familie ware von Engelland. Aber es ware nicht mehr zu helfen, er mußte aufgehänget werden.

Puis on se rendit au quartier général pour arrêter Arnold qui était l’instigateur de cette trahison[121]. Cet Arnold était un Anglais qui, avant de venir chez les Américains, avait servi chez les Anglais et avait déserté, et qui devint général chez les Américains car c’était un homme qui s’y entendait dans l’art de la guerre[122].

Alsobald ginge man auch gleich ins Haubt-Quartier um Arnold auch zu fangen welcher diese gantze Veräterey an-gestifftet hatte : Dieser Arnold ware ein Engelländer und hatte vorher ob er zu den Americanern gekommen in engellischen Dinsten gestanden und ist von ihnen desserdirt und bey den Americanern General geworden weil er ein Mann gewessen der die Kriegs-Kunst sehr wohl ver-stunde.

Cet Arnold retrouva crédit auprès des Anglais grâce à sa trahison, qui fut cependant manquée, mais il fut réincorporé chez les Anglais avec le grade qu’il avait auparavant et se vit aussitôt confier le commandement d’un corps franc et se battit aussitôt contre les Américains

Dieser Arnold machte sich durch seine Veräterey wiedrum in guten Credit bey den Engelländer welches ihm aber fehlschluge, doch aber wurde er dadurch bey den Engelländer wiedrum aufgenommen in seinen Grad wo er gehabt hat vorher und bekam gleich ein Frey-Kohr zu comandieren und gleich wiedrum gegen die Americaner gestritten

[réclame]

und

https://gallica.bnf.fr/iiif/ark:/12148/btv1b10110846m/f28/pct:50,0,100,100/,700/0/native.jpg

Strasbourg, Médiathèque André Malraux, ms f 15, p. 55.

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 Notes

121. Benedict Arnold est né le 14 janvier 1741 à Norwich dans le Connecticut. Lorsque le conflit éclate entre les colonies et la métropole, Arnold est un marchand prospère quoique sévèrement touché par les restrictions du commerce imposées par le Parlement. Il est élu capitaine de la milice du Connecticut en mars 1775, il participe au siège de Boston, puis se porte volontaire pour attaquer le fort Ticonderoga au nord de la Nouvelle-Angleterre. Nommé colonel, il s’illustre ensuite lors de l’invasion du Québec et du siège de la ville de Québec. Il se bat vaillamment lors de la retraite américaine vers le sud (bataille de Valcour Island), puis dans la défense du Rhode Island (bataille de Ridgefield). Son rôle lors de la victoire américaine de Saratoga est capital alors qu’il est sévèrement blessé. Arnold est alors reconnu pour ses faits d’armes. Populaire au sein de la troupe, il a en revanche accumulé un nombre important d’ennemis politiques. Il est d’ailleurs plusieurs fois écarté au profit d’autres officiers pour l’avancement. Il se lie ensuite financièrement aux Tories, et se marie avec une jeune fille, Peggy Shippenn ayant des relations avec un certain major John André, chef du service d’intelligence du général Clinton. Mécontent et pessimiste, mal-aimé du Congrès, Arnold s’engage progressivement dans des négociations avec Clinton dans le but de changer de camp, pour obtenir le poste tant convoité de brigadier général, avec une large compensation financière. Commandant de la forteresse de Westpoint en août 1780, il propose à Clinton de livrer ce point stratégique aux forces anglaises. Mais le complot est découvert lors de la capture du messager, John André. Informé très tôt de sa capture, Arnold a le temps de s’enfuir, seulement quelques heures avant une visite inopinée de Washington. La nouvelle de la trahison est un choc immense pour les Américains, pour Washington qui faisait confiance en cet officier qu’il considérait comme son ami. Malgré l’échec du complot, Clinton nomme Arnold brigadier général, puis l’envoie en Virginie avec 1 600 hommes. Arnold capture la ville de Richmond, mène une campagne de pillage à travers la Virginie. Bien qu’il soit possible que les troupes sous les ordres d’Arnold aient commis des exactions durant une campagne militaire marquée par le pillage et la lutte contre la milice de Virginie, il semble néanmoins que les méfaits décrits par Flohr (voir plus haut) sont exagérés et imputables à ce personnage du fait de sa triste réputation. Arnold est à la tête de ce détachement anglais jusqu’à l’arrivée de Cornwallis en Virginie (20 août 1781), il est relevé de tout commandement par la suite. Arnold meurt à Londres le 14 juin 1801, seul et désargenté.
122. En cette fin de XVIIIe siècle, « l’art de la guerre » est bien plus qu’un simple savoir-faire. Si le mouvement de « réduction en art » est ancien, nous sommes ici à l’apogée de la systématisation de la science militaire. Aux théoriciens qu’étaient Vauban, le maréchal de Saxe ou le chevalier de Folard, s’ajoutent les figures de Guibert, Montalembert ou encore Ménilmontant. Cette mise en système, illustrée par le Défense du système de guerre moderne de Guibert (1779), touche de plus l’ensemble de l’Europe, l’allemand Bülow écrivant quelques années plus tard son Esprit du système de guerre moderne (Der Geistes des neuen Kriegssystems), poussant la mathématisation de la guerre à son plus haut degré. L’art de la guerre est donc une notion particulièrement en vogue pendant le conflit américain et constitue un des grands thèmes de la réflexion militaire menée à l’époque.